lundi 28 avril 2014

[Opinion] Le retour des punks

Le présent vient du passé

Le punk n’est jamais mort. Ceux qui en veulent la preuve n’ont qu’à se rendre à Berlin, dans le quartier de Friedrichshain. Là, entre les clubs touristiques et les bastions de l’underground, ils trouveront parmi les derniers squats autogérés d’Europe de l’Ouest luttant pour leur survie.

Cependant, le tournant du nouveau millénaire avait majoritairement relégué la culture punk à un objet marketing bien sage pour adolescents en mal de sensations. Ecrasé, l’ex-courant libertaire vendait des meubles et du parfum pour les grandes enseignes. Ses derniers rejetons occupaient plus la presse people que les pages débats des grands quotidiens. C’est que l’époque était au triomphe de la société de consommation et les vaincus, punks, mais aussi hippies et autres chantres de la décroissance étaient moqués, bouffons au cirque de l’Argent.

La révolution au salon

Puis vint 2008. Progressivement le monde occidental s’enfonça dans la crise. Les géants politiques perdirent pieds, se retrouvant à genoux face aux économistes. Le reste de la planète se mit à railler la grande Amérique et ses alliés européens. Les écarts de richesses éclatèrent au grand jour et se creusèrent tandis que la précarité gangrénait les pays. On vit fleurir des mouvements prônant un changement de modèle globale : Indignés, Occupy, les idées se rependirent lentement dans toute la société, pour le meilleur et pour le pire. Nous prenions conscience de l’urgence du changement.

Comme il est d’usage lorsqu’on veut changer, on regarde notre passé… Avant, il y a eu la beat generation et les hippies, ils furent les premiers repris dans les discours puis par les standards de la Mode, en musique, en vêtement... Mais Ces derniers étaient incompatibles avec la société actuelle car fondé sur l’espoir offert par une société roulant vers son âge d’or. Alors, il fallut regarder du côté des cultures post-73 : punk, grunge, hip-hop, reggae…

Les ados qui avaient grandi avec ces contrecultures étaient désormais des consommateurs en pleine possession de leur budget. Chaque mouvement était réutilisable par la Mode et au-delà, par la société politique. Ainsi, la culture punk avait une idéologie sociopolitique finalement proche du mouvement libérale dominant – donc, facilement appréhendable : mélange de pensées libertaire, de pessimisme et de fonctionnement en autogestion, le punk avait œuvré, dans son temps, à l’émergence de nombreux labels et salles spectacles indépendants des majors. Cette idée d’indépendance – d’auto-entreprenariat – était encrée dans l’esprit de la nouvelle génération par le discours gouvernemental qui y voyait la solution pour « boosté l’économie ». Les labels et les artistes autoproduits fleurirent donc, aidés par internet et les possibilités de financement participatif (pub au passage).

Le futur MEDEF

L’assimilation peut désormais se faire dans les médias pseudo-jeunes, qui commencent à s’interroger sur le retour du punk. Le punk intellectuel renait, récupéré, systémisé, mais sérieux, affranchi des moqueries : la bête sauvage a connu l’emprisonnement et l’humiliation du cirque, elle peut maintenant brillée comme animal domestique, aimé de tous.

Le punk n’est jamais mort, non, il s’est assagit et les derniers spécimens sauvages sont observables dans leurs réserves, à Berlin ou ailleurs.

Pala